Mwarf, ce mec, Raphaël Enthoven, vaut réellement son pesant de cacahuètes.
Pas un seul instant il ne semble douter. Pas un seul instant la pensée ne lui effleure que peut-être il pourrait avoir rien qu'un peu tord. Qu'il aurait pu manquer le moment où l'homme qu'il traine dans la poussière a précisé que c'était ni plus ni moins que son opinion qu'il exprimait et - évidemment - qu'il s'agissait de second degré. Comment peut-on louper ça ? Comment un homme qui se prétend aussi érudit que monsieur Enthoven peut-il à se point manquer de discernement pour prendre au premier degré ce qui relève si manifestement du second. Peut-être parce que lui-même insulte joyeusement et sans jamais en démordre un inconnu. Il persiste et signe.
Mon Dieu, est-ce qu'au moins 2 de ses neurones sont connectés dans sa petite tête pleine de connaissances mais vide semble-t-il de savoir ?
Bon, au moins je lui reconnais son courage (ou sa bêtise vaniteuse, je ne parviens pas à me décider) de dire haut ce que beaucoup parmi cette fameuse élite pense bien plus bas.
Il méprise Durendal comme il méprise la foule et s'étonne de la réaction des deux. C'est un troll ou je ne m'y connais pas.
En tous cas monsieur à peur de la foule, ce qui me fait beaucoup de plaisir. Qu'il vive dans la peur. La même que sa caste impose à la plèbe. Au moins nous avons cela en commun.
Ci-dessous une copie de la réponse de R. Enthoven car je m'en voudrais beaucoup de la perdre.
De quoi Durendal est-il le nom ? 210
24.12.2014
Dans le cadre d'une émission consacrée à Alexis de Tocqueville dimanche 21 décembre, "le Gai savoir" a diffusé et critiqué les propos d'un blogueur très suivi pour ses vidéos sur le cinéma, et par extension, livré un point de vue sur internet. Ces propos ont suscité de très nombreuses réactions, en particulier sur les réseaux sociaux. Raphaël Enthoven y répond par ce texte.
La toile est ainsi faite que ses prédateurs se vivent comme des victimes.
Le Gai Savoir consacré à Alexis de Tocqueville dimanche dernier 21 décembre fait l’objet, depuis 48h, d’une petite chasse aux sorcières passionnante, car elle met en miroir le propos de l’émission elle-même.
Nous y sommes, Paola Raiman et moi, insultés comme Marie-Antoinette : « snobs », « condescendants », « narcissiques », « pédants » (donc) « médiocres », « mandarins indignes », « philosophes d’Etat » et, pire que tout, « contre-révolutionnaires »...
Quel est donc notre crime ? Que nous reprochent ces vaillants défenseurs du peuple contre une offensive réactionnaire ? D’avoir tout simplement présenté comme « la bave du crapaud » une saillie d’un certain youtuber surnommé « Durendal » à propos du dernier film de Jean-Luc Godard, L’adieu au langage : « c’est amusant que le personnage principal de son film soit un chien, parce qu’il est temps de le faire piquer... Je veux dire, c’est une catastrophe... à ce niveau-là, c’est... y faut... Ouais ! Injection létale, ouais. Cette espèce de vieux con, là, qui se permet de donner des leçons de cinéma à tout le monde, alors qu’il maîtrise même pas son outil à la base... »
Deux précisions s’imposent ici :
1) Le propos du Gai Savoir n’est pas de créer une polémique, mais de donner à comprendre une oeuvre classique. Pour ce faire, tous les moyens sont bons, à commencer par l’examen de phénomènes contemporains à la lumière de l’oeuvre en question. En l’occurrence, Tocqueville, homme du XIX, donne plusieurs fois l’étrange sentiment de parler des internautes quand il examine les pathologies de la démocratie naissante... Rien de personnel, donc. Durendal n’est pas une cible pour nous. Juste un symptôme.
2) Moi-même, je n’adore pas le cinéma de Godard. Hormis Pierrot le fou, je n’ai jamais réussi à voir ses films en une fois. En DVD, je le mets sur pause. Au cinéma, je m’endors. Mais ce n’est pas le problème.
Le problème, c’est qu’il est aujourd’hui possible d’appeler publiquement au meurtre d’un homme, tout en s’indignant ensuite d’être, en retour, traité d’abruti... Le problème, c’est l’hyper-sensibilité du cracheur de fiel (et sa bêtise : faut-il être con pour se vexer d’être insulté après avoir publiquement appelé à l’euthanasie de Jean-Luc Godard !).
Durendal nous reproche de l’insulter quand lui-même insulte, à la façon des enfants qui veulent bien jouer à la bagarre, mais à la condition que les parents gardent les mains dans le dos.
Durendal nous reproche de le juger à l’emporte-pièce, de n’avoir pas pris le temps d’étudier tout son travail, avant de le claquer. Mais faut-il vraiment une exégèse intégrale de son oeuvre pour être en droit de déclarer qu’il est idiot d’appeler à « piquer » un homme « comme son chien » ? Durendal a-t-il lu le Procès de Kafka, et sa dernière phrase ?
En vérité, n’en déplaise au jeune patricide (qui trouve peut-être ici l’occasion de faire un peu parler de lui), Durendal n’est pas quelqu’un en particulier. Au contraire. Durendal est nombreux. Durendal, c’est une masse. C’est le patronyme de l’ensemble à la fois compact et disparate des gens qui prennent l’insolence pour de la liberté, et l’opinion pour une pensée. Durendal, c’est le pseudo de la meute. Dont il faudrait tolérer les crocs, sous peine d’être un vieux con. Or, vos dents de lait, jeunes gens, ne vous donnent pas le droit de mordre.
Pris individuellement, le Durendal ne fait ni mal, ni peur. C’est juste un adolescent qui est inoffensif parce qu’il est méchant (ou bien l’inverse). Mais qui inspire plutôt la bienveillance. Chaque Durendal est aussi intéressant qu’un homme peut l’être. On peut discuter avec un Durendal, échanger des arguments, partager des émotions, voire (qui sait ?) parler de Godard... Mais quand tous les Durendal s’unissent et aboient de concert, alors ils deviennent dangereux. Car ils institutionnalisent le ressentiment. Ils transforment la contestation en consensus. Ils grégarisent l’insolence. Ils maquillent l’incompétence en liberté de ton. Seulement, la liberté qu’ils réclament n’est qu’un droit de couvrir de goudron leurs aînés. Et ils nuisent au talent, comme les fourmis l’emportent sur le lion : quand elle est abondante, on peut se noyer dans la bave. Durendal, c’est le nom du combat victorieux que la « créativité » fait à la création véritable.
Or, c’est exactement de cette façon que, selon Tocqueville, la majorité risque paradoxalement de devenir tyrannique (ce qui était le propos de l’émission) : quand le droit s’incline devant l’usage, quand le politique baisse son froc devant l’opinion publique, quand la foule légifère, dicte ses normes, montre ses muscles... mais interdit qu’on lui rende les coups.
Ça donne le spectacle ahurissant d’une horde cannibale et susceptible, qui s’autorise à enterrer vivant Jean-Luc Godard, tout en refusant absolument qu’on lui en fasse le reproche.
Ça donne le conformisme de l’anticonformiste, la toute-puissance de celui qui confond le droit de s’exprimer avec l’équivalence des opinions, qui enfonce des portes ouvertes avec le sentiment de prendre la Bastille, et qui vit sa propre irrévérence comme une audace, alors que – enseigne Tocqueville – ce n’est qu’une façon pour lui de se plier aux commandements du plus grand nombre : « dans les républiques démocratiques, où la vie publique est incessamment mêlée à la vie privée, où le souverain est abordable de toutes parts, et où il ne s'agit que d'élever la voix pour arriver jusqu'à son oreille, on rencontre beaucoup plus de gens qui cherchent à spéculer sur ses faiblesses et à vivre aux dépens de ses passions, que dans les monarchies absolues. Ce n'est pas que les hommes y soient naturellement pires qu'ailleurs, mais la tentation y est plus forte et s'offre à plus de monde en même temps. Il en résulte un abaissement bien plus général dans les âmes. »
Durendal déclare, pour sa défense, que nous détestons Internet. Mais ce n’est pas Internet qu’on déteste. Ce sont les foules. Et surtout la foule qu’on porte en soi. La foule qui adore se cacher derrière le sentiment d’être seul de son camp. Et qui montre ses quenottes quand on lui explique que la liberté est aussi une affaire de limites.